La pratique d’Agnès Fornells s’est développée à partir de séjours à l’étranger, généralement en lien avec un contexte urbain et de rue, particulièrement en Espagne et en Amérique latine. Son travail est ainsi entré en relation avec la langue espagnole et le rapport étranger à sa pratique parlée, écrite (ou chantée). Elle a d’abord utilisé principalement l’image photographique et vidéo, dans laquelle une place importante est parfois faite aux mots. Son travail porte notamment sur l’espace public, ses usages et son occupation, en lien avec différentes expressions de la culture. Elle réalise ses images sans mise en scène, dans un espace social ou dans la rue. Ce matériau, capturé sur le vif, est ensuite remis en jeu par des choix de cadrage, de montage, de déplacement dans un autre contexte, voire par une interprétation dans un autre champ plastique. Une ouverture de son travail vers le volume et la céramique s’est mise en place à l’occasion d’une résidence à Artelinea en 2018. Elle a ainsi expérimenté des pièces en volume selon un principe de « reconstitution » de situations et d’objets photographiés.
En 2023, l’exposition Menus travaux à la galerie AL/MA proposait un dialogue entre deux aspects de son travail récent, autour de l’idée d’un inventaire d’objets composant son espace d’atelier: d’une part des céramiques à échelle 1 et d’autre part une série d’images issues d’un procédé photographique rudimentaire, retouchées numériquement. Ces deux formes d’empreintes du réel lui permettent de rejouer des situations crées par différentes activités du quotidien allant du travail à la fête. Lors de ses précédentes expositions, l’espace urbain, les rues, en particulier celles de Mexico, étaient évoquées, presque « reconstituées » par la photographie et l’installation d’objets en céramique. Puis ces prélèvements dans la réalité ont été effectués dans une proximité plus intime, celle de l’appartement/atelier. Ils s’inscrivent dans cette même recherche sur la présence des objets dans un environnement donné, indices de l’occupation habituelle d’un lieu. Un glissement s’est fait entre la rue et l’atelier et, dans l’environnement personnel, certains objets parlent d’un « à côté » du travail, en se mêlant aux outils et ustensiles qui semblent en attente qu’on revienne à l’ouvrage.
En parallèle de l’esthétique précaire et bricolée des pièces réalisées en volume, un autre aspect de la perception des objets est exploré, plus géométrique et abstrait, comme si, en les posant sur un support photosensible, c’était leur ombre qui était capturée. Ces Menus travaux, sous un titre qui évoque la mesure discrète des actes du quotidien, associent des répliques d’objets en volume, tels des pièges visuels, à leurs ombres portées photographiques.