Dessins

1994-1995

Crayon noir sur papier 
Dimensions variables

Le luxe appelle l’idée de volupté et, de façon moins évidente quoique entérinée par une prestigieuse citation, le calme. De fait, les films d’horreur à gros budget n’ont jamais enfanté que des monstres gras, finalement poussifs et accommodants avec les héros surpayés. Tandis que les meilleurs films d’épouvante ont toujours été l’œuvre de producteurs fauchés aux financements introuvables et aux idées percutantes. Virginie Loze compterait dans l’univers des arts plastiques parmi les créateurs inspirés et démunis faisant de leur pauvreté une rage et de leurs outils rudimentaires des armes de l’esprit. Elle traîne mentalement dans l’univers aussi repoussant qu’attirant des séries Z, du rock rugueux ou des comics underground auxquels elle emprunte un anglais trash, des personnages aux yeux excavés et un lyrisme à peu près aussi secret que la créature des marais. Avec la précision d’un chirurgien amateur mais déterminé, elle opère à la mine sur de larges feuilles qu’elle fixera avec des pointes, elle incise des lignes qui se révèlent de faille et de fouille, elle extirpe des traits intoxiqués et des  jeux de mots privatifs, elle expose des monstres émus d’avoir échappé à l’adolescence ennuyée et aux rediffusions nocturnes. Ne soyez pas dupe de sa violence référentielle. Il ne s’agit pas de révérence distanciée au second degré d’une sous culture quasi pop, plutôt d’un souci de retrouver l’os et la cendre, l’humanité grimée dans sa caricature, et l’essence d’un dessin qui gratte l’image et touche du doigt la plaie de l’icône.

Jacques Norigeon, Freak sister, in Carnet Sagace n° 16 Virginie Loze