Merle blanc

2023

Vues de l'exposition collective Merle blanc avec Élise Pic
Galerie 3.1, Toulouse
Commissaires François Couturier, Valérie Mazouin-Charrier et Serhiy Wolkonsky
Dans le cadre de la sortie de résidence Le coutumier, avec la participation de Jacques Barbier, François Couturier, Agnès De Gracia, Luka Lenain, Élise Pic, Serhiy Wolkonsky, Noham Bares, Coralie Cruchet, Sarah Gomes Pereira, Valérie Mazouin-Charier et Xavier Pinel, Institut Thérapeutique Éducatif et Pédagogique L'Essor Jean Plaquevent, Saint-Ignan, en partenariat avec le DITEP - Dispositif Institut Educatif et Pédagogique l'Essor Jean Plaquevent de Saint-Ignan, la Chapelle Saint-Jacques centre d'art contemporain de Saint-Gaudens, le Conseil départemental de la Haute-Garonne et l'UCRM - Union Cépière Robert Monnier

Le Conseil départemental de la Haute-Garonne, l’UCRM – Union Cépière Robert Monnier, la Chapelle Saint-Jacques centre d’art contemporain de Saint-Gaudens, Le DITEP - Dispositif Institut Éducatif et Pédagogique l’Essor Jean Plaquevent de Saint Ignan ont initié une résidence à la campagne ouverte à deux artistes plasticiennes.

Pour sa première session, la résidence Le coutumier a accueilli Socheata Aing qui pratique la performance, fait l’expérience des lieux qu’elle traverse, met en mouvement des objets qu’elle fabrique et Élise Pic – Collectif Le commun des mortels - qui glane et accumule des photographies vernaculaires dont elle s’empare comme d’une matière première.

C’est dans la maison du parc, l’atelier-logement, à deux pas du château où travaillent les professionnels DITEP, qu’elles se sont installées. Un jour, elles se sont mises en cuisine avec les enfants et leur enseignante. Un autre, elles sont allées glaner des objets dans les brocantes alentour. Entre vacances d’esprit et création, elles ont laissé courir les mots et ont appréhendé ce qui les entourait. La vue belle et douce offrait des silences, la forêt épousait les respirations.

Les circulations allant de l’usuel à la pratique plastique ont donné un souffle. Merle blanc s’est alors invité dans ce temps discret. Les gestes de Socheata, auprès des cœurs silencieux des âmes des lieux, poursuivaient le motif de ses pas sur le plancher du château. Les images d’Élise, souples en apparitions douces, entraînaient ses regards. Elles s’aidaient à se perdre, à se donner toute latitude de saisir l’impalpable récit des histoires en suspens.

Merle blanc comme un point d’interrogation. Quand les attitudes prennent formes


Texte de Valérie Mazouin-Charrier écrit à l’occasion de l’exposition collective.



Le papier peint

C’est comme des vêtements pour les murs, ça leur tient chaud, ça les égaye, ça donne le ton.
Ça ressemble aussi à du papier cadeau,
mais quand on l’arrache, il n’y a rien de neuf.
On découvre des murs qui s’effritent, qui ne tiennent pas à grand-chose.
C’est le papier peint qui faisait tenir ces épais murs,
Mais en réalité, ce sont des éponges, humides et pleines d’aspérités.
Je peux arracher le papier peint, mais les murs ne me laissent pas tout prendre.
Ils en ont encore besoin.
Le papier lui-même est le cadeau,
il a cette force, cette magie.
Comment honorer, remercier ces murs qui nous ont accueillis ?
Pendant longtemps, je ne voyais que la dureté des murs étroits de notre appartement,
c’était sans voir la couleur qui venait adoucir la solitude.
La couleur recouvrait les murs de chaque pièce,
le séjour et le couloir étaient rose fuchsia, la couleur préférée de mon père,
la cuisine avait un motif de feuille d’automne,
les toilettes et la chambre avaient une couleur orange avec des nuances effet peint
la salle de bain aussi,
et la chambre de mes parents avait du papier blanc à motifs texturés.
Le papier peint est resté le même depuis tout ce temps.
Comment en serait-il autrement ?
Il y a les murs, le papier peint, les cadres à photos qui le recouvrent, puis les commodes, les meubles, puis par-dessus les canapés et les tables, et par-dessus encore, les lourdes chaises en bois qui passent difficilement les encadrements de porte, si bien qu’il faut les soulever au-dessus de nos têtes pour pouvoir les déplacer.
Et à l’intérieur, il y a nous,
ma mère,
mes sœurs,
les plantes,
mes beaux-frères qui sont très grands,
et mes nièces et neveux qui se frayent un chemin au sol.
On est comme à l’abri du monde extérieur,
c’est ce que voulaient mes parents, je crois.
Qu’il y ait tout ici, à l’intérieur pour se sentir chez soi.


Extrait de Les petites mémoires