Barma

Marion Mounic travaille sur les mondes de la perception et du rapport que le public peut avoir face à une œuvre. Elle exploite aussi bien l’installation que la performance en utilisant des matériaux et techniques tout aussi diverses. En prélevant dans les objets du quotidien, elle inverse les normes pour réécrire une poésie de la banalité.
À partir de ses souvenirs et de ses racines franco-marocaines, l’artiste part à la conquête d’un récit fédérateur où la petite et la grande histoire fusionnent.
Elle nous entraîne dans une expérience immédiate de l’altérité, entre révélation et disparition, à l’instar du travail perpétuel de la mémoire. Elle dessine dans ses créations l’histoire des femmes et des histoires sociales : de l’espace intime à celui de la résistance collective. Marion Mounic opère au sein de Mémento un dérèglement architectural et émotionnel. Cet ancien lieu de stockage des archives fut jusqu’en 2020 un espace dérobé fermé au public. Encore dans un état brut, il devient pour l’œuvre un écrin tant physique que psychique.
Barma puise dans les âmes populaires des hammams qui densifient la parole des femmes et intensifient le groupe. Devenu au fil du temps un lieu central de rencontres où se joue une grande partie de la vie sociale, le hammam symbolise ce moment de partage et de relaxation. Surnommés le « café des femmes », les mères avaient autrefois l’habitude de chercher dans les hammams les futures épouses de leurs fils. Aussi, des codes sociaux permettaient de connaitre les situations familiales de chacune en fonction de la couleur de la serviette.
Avec Barma, Marion Mounic récrée une antichambre artistique plongeant le·la spectateur·ice dans une rencontre directe avec la perception.
Le ressenti est mis à l’épreuve par un jeu de lumières, la température semble monter, la vapeur de l’eau devient presque perceptible.
Mais surtout, l’artiste bascule la création pour la transformer en un lieu du corps social et de l’affect où le public est invité à s’allonger, rester autant qu’il le souhaite, discuter avec ses ami·es ou des inconnu·es pour remettre le bien-être en éveil.

Karine Mathieu, directrice Mémento Espace départemental d’art contemporain, Auch.