Prélude
2019
Le groupe d'artistes se constitue autour de la proposition d'Emmanuel Simon
- Photographies du lieu d'intervention à Fiac
- Notes sur un document de travail partagé
On a coutume de dire que 20 ans est « le plus bel âge de la vie ». Cette assertion, parfois galvaudée, prend tout son sens avec cet événement unique qu’est « Des artistes chez l’habitant ». Depuis toutes ces années, quasiment deux cents artistes sont venus à Fiac et dans ses alentours pour y produire un travail inédit, dans un environnement tout aussi inédit, puisque présenté chez l’habitant. Chaque artiste, chaque hôte ayant participé à cet événement possède ainsi une histoire singulière à partager, témoignage précieux de ces moments de rencontre, de complicité et d’échange qui ont fait la spécificité de cette manifestation.
Sans parler de bilan, cette vingtième édition des « Artistes chez l’habitant » est l’occasion de se pencher sur cette aventure improbable, qui perdure pourtant encore aujourd’hui. L’occasion de regarder le chemin parcouru, de s’interroger sur cette histoire en marche, mais aussi, et surtout, d’en imaginer le futur.
C’est sous ce terme d’ « histoire », au sens large, que se placera donc cette vingtième édition, permettant d’aborder tant les moments uniques permis et offerts par ce festival, que la vision toujours acérée des créateurs sur les bouleversements de nos sociétés contemporaines, en perpétuelle évolution. Entremêler les « petites » histoires et la « grande » Histoire. Privilégier la rencontre, l’échange, l’interaction, tout en portant un regard particulier sur l’évolution du monde, comme seuls peuvent et savent le faire les artistes.
Antoine Marchand, commissaire général du Festival Des artistes chez l’habitant 2019 - Histoire(s), extrait du catalogue de l’exposition
Le 12 août 2019 à 20:04 - Emmanuel Simon à Lori Marsala
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J’ai été invité par Paul de Sorbier, directeur de la Maison Salvan à Labège, à participer au festival, « des artistes chez l’habitant », qui en est à sa 20ème édition. Celui-ci a lieu dans le Tarn, dans le village de Fiac, le week-end du 13 septembre. Le principe de ce festival est simple, il consiste à inviter 10 artistes et chacun·e va investir l’espace domestique d’une famille. Même s’il est possible d’amener des œuvres existantes qui se retrouveront installées dans un environnement atypique, il est surtout demandé que soit initiée une production, sur place, avec et dans le contexte.
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Nous serions accueillis chez un habitant du village pour bosser en amont du festival. Les dates sont à définir, n’importe quand à partir de fin août et grosso modo jusqu’au début du festival. Entre une et deux semaines selon nos disponibilités.
Je me suis déjà rendu chez lui afin de voir les espaces qu’il était possible d’investir. Cet habitant, Philippe, loge dans une maison semi troglodyte. Sur l’ancienne grotte existait un château qui, depuis, n’existe plus et dont il ne reste quasiment aucune info. On en voit des vestiges chez lui (l’épaisseur des murs de la cave). Philippe est en train de tout refaire, il détruit les anciennes cloisons et faux plafonds pour faire ré-apparaitre les poutres et les vieilles pierres.
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Un des principes de mon boulot, voir même la plus grosse spécificité, est que je convie toujours des gens/artistes à venir travailler avec moi. Si le projet t’intéresse je t’en dirais plus.
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Concernant les détails logistiques, il y a une bourse de prod de 750 € max qui sera à répartir entre les membres du groupe selon nos besoins. Déjà il faudra déduire les billets de train, cela dit comme tu es à Toulouse ça fera des économies. Également, il y a des honoraires à partager, 450 € si mes souvenirs sont bons. Nous serions logés chez Philippe.
Le 15 août 2019 à 12:04 - Emmanuel Simon à Côme Calmettes
Salut,
Du coup pour tout ce qui est organisation on va voir ça par message ça sera plus pratique.
Je viens d’envoyer un mail à Léa Vessot, également diplômée de l’isdaT, pour lui proposer de participer au projet. Je te joins son portfolio.
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Alors, concernant mon projet pour cette expo à Fiac je suis tout d’abord parti d’une anecdote concernant l’origine de ce festival. Quand Patrick Tarres (le fondateur) crée ce festival, il y voit comme un pied de nez à la Foire Internationale d’Art Contemporain. La FIAC ça ne représente pour moi qu’un boulot alimentaire, j’y ai bossé en tant que monteur il y a deux ans et je vais y bosser cette année. Nous sommes des tonnes de jeunes (ou moins jeunes) artistes à y travailler et à mes yeux il n’y a aucun intérêt artistique dans cette manifestation, c’est tout ce qui me dégoûte dans l’art.
J’ai donc voulu constituer un groupe composé de personnes avec qui j’avais bossé en tant que monteur là-bas. Peut-être dans l’idée de travailler sur les conditions des jeunes artistes en France. J’ai contacté Ronan le Creurer et Paul Pedebidau. Ronan étant pris par deux expos qui approchent à grand pas et Paul bossant au Palais de Tokyo à ce moment là, j’ai commencé à réfléchir à d’autres invitations et je me suis dit que cette exposition n’était peut-être pas le lieu opportun pour faire quelque chose d‘“engagé” sur les conditions de travail des artistes. Que le lieu dans lequel Philippe nous accueille était quand même hyper particulier et en pleine transition et qu’il était peut-être plus intéressant d’axer mes recherches sur ça.
Du coup je contacte Flora Moscovici. Je te joins un entretien dans lequel elle parle de l’atelier, de la peinture, de l’in situ, c’est assez bref mais c’est quasiment mot pour mot ce que je pourrais dire si j’étais amené à parler de peinture. Son lien au lieu et sa peinture m’intéresse vraiment beaucoup. En parallèle ça me fait penser à ta pratique. Je croise aussi sur internet le boulot de Lori Marsala et je pense à celui de Léa Vessot.
Flora ayant trop de projets en cours elle refuse. Lori également. Et Léa suspense.
Alors pour rentrer dans le vif du sujet. J’avais déjà pensé à ton boulot pour mon projet à l’École d’arts plastiques de Denain (l’expo a eu lieu en mai dernier), mais finalement j’étais parti sur tout à fait autre chose. De prime abord il y a ce lien avec l’espace qui m’intéresse, l’espace du lieu même dans lequel on se trouve, dans lequel on travaille, dans lequel on expose, l’espace dans lequel le spectateur se trouve lui aussi. Il n’y a plus besoin d’atelier, il n’y a qu’une unité de lieu pour reprendre les règles du théâtre classique. Au-delà de susciter mon unique intérêt ça correspond parfaitement à l’idée de ce festival. Ensuite il y a ton rapport à la rénovation et la réparation qui s’inscrit à merveille dans la maison de Philippe. C’est un cadre très particulier une maison en rénovation, particulièrement dans son cas où il retire les aménagements qui ont été faits pour essayer de se rapprocher de la maison d’origine. Elle est chargée d’histoire entre cette grotte, ce château disparu et la transition que Philippe est en train d’opérer. C’est pour ça que j’ai considéré qu’il était plus intéressant de travailler sur ce lieu plutôt qu’autre chose.
Contrairement aux pratiques de Léa ou Flora qui vont faire des peintures partant du lieu mais qui passent par le prisme de leur ré-interprétation des éléments et de leurs sensibilités, ta pratique est plus en prise avec le réel. Tu vas sélectionner des éléments concrets de l’espace sur lesquels tu vas intervenir. Alors que moi je vais choisir des éléments concrets de l’espace que je vais représenter. Je suis donc curieux de voir comment ces trois manières de faire différentes peuvent interagir, ou non, les unes avec les autres et avec le lieu.
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Il faut que l’on garde en tête qu’absolument tout est possible, tant que Philippe est d’accord on a vraiment carte blanche. Pareil pour notre manière de travailler ensemble. Ma pratique consiste à créer un moment durant lequel des artistes décident, ou non, de bosser ensemble. Bosser ensemble ça peut tout simplement être un accrochage collectif de nos œuvres, comme ça peut être de la co-création, etc… Il y a plein de variations possibles.
Notes sur un document de travail partagé