Disque
2017
Album Vinyle, tirage limité à 500 copies, sortie en Novembre 2017.
Écrit, composé, enregistré et mixé à l’Espace Croix Baragnon, Toulouse en janvier et février 2017 par Michel Cloup
Mastering : Triboulet / Studio de la Trappe, Toulouse.
Michel Cloup : voix, guitare, collages sonores, rythmes virtuels, textes et musiques.
Béatrice Utrilla : voix, textes, images.
Pochette : Béatrice Utrilla.
Graphisme : Zoé Febvre-Utrilla.
Avec le soutien de l’Espace Croix Baragnon, le fond de dotation Agnès B., Virginie et Marc Lagouarre, La cuisine Centre d’art et de design, Nègrepelisse.
Depuis plus de 20 ans, quand celle-ci a prêté à Diabologum la photo qui enveloppe leur troisième et dernier album, Béatrice Utrilla apparaît en surpiqûre du travail de Michel Cloup. De pochettes en projections ou vidéo-clips, cette “collaboration occasionnelle mais récurrente” a fini par baliser la carrière des deux artistes. Indissociables l’un de l’autre pour qui s’intéresse à l’autre comme à l’un. États des lieux intérieurs est pourtant leur premier projet commun ; la première fois qu’ils n’apparaissent pas en appui du travail de l’autre, mais qu’ils construisent réellement à deux. Progéniture d’une résidence à l’Espace Croix-Baragnon de Toulouse, le disque sort en novembre 2017 et offrira l’occasion de découvrir le travail dans son ensemble, avec une série de concerts et d’expositions / installations / projections.
“Le plus difficile ce n’est pas de commencer mais de continuer (…) il faut avancer, malgré tout.” C’est au final la justification et l’objectif de ce travail qui, moins qu’une conversation, s’apparente à un monologue à deux voix. L’introspection d’une génération, la dernière qui a cru au lendemain, au collectif; la première qui s’est effondrée sur le renoncement avant même d’être vieille. Paumée au mitan d’une vie d’adulte sans se rappeler de pourquoi on a fait tout ça et usé d’avoir à persister. Balafrés de souvenirs jusqu’à la paraplégie et contraints à avancer quand même pour ceux d’après.
Cet itinéraire dans le verbe rejoint celui que les deux artistes suivent depuis le début, chacun dans leur discipline respective. Pointer le très réel au travers d’une figuration dont l’objet est absent. Un travail elliptique qui, dans les photographies de Béatrice comme dans les chansons de Michel, laisse au public l’espace de retrouver sa propre histoire.
Michel Cloup, libéré des contraintes structurelles et rythmiques, recentre ici son travail sur le son. Non pas sur la qualité technique du son, mais sur son traitement comme sujet. Organique toujours, parfois minéral, souvent atmosphérique. Il ne compose pas des paysages mais des climats, des odeurs, des vecteurs sensibles comme autant de prises sur la falaise mémorielle de chacun. Béatrice Utrilla, dont le travail plastique qui renvoie à des fréquences tantôt claires tantôt hirsutes donne à voir dans l’existant anecdotique la suggestion du commun insaisissable, place pour la première fois sa voix, des mots, dans son travail. Et ceux-ci trouvent naturellement leurs marques dans les pas de Michel. À force de cheminer ensemble, il n’est plus nécessaire de demander à l’autre la direction à prendre, elle s’impose d’elle-même.
Les différents caractères du projet —plastique; verbal; musical— conservent la figuration pour flécher l’élément absent en évitant soigneusement l’abstraction. Le titre, États des lieux intérieurs est à prendre au pied de la lettre : Béatrice et Michel constatent l’existant à la recherche d’un sens à tout ça, qui se serait caché dans un recoin, derrière une armoire, au fond d’un disque dur oublié dans un tiroir. Et si le disque fait mine de tracer une boucle, il admet que le cercle est imparfait, que son point d’arrivée ne coïncide pas tout à fait au point de départ même s’il y ressemble. Personne ne sort indemne d’un état des lieux intérieurs.
Nicolas Chapelle