ALZ-112

2015

Installation d’enrichissements animaliers
Objets de récupération, chaines et cordages
Glaçons, fruits, légumes et viande
Vues de l'exposition Igitur, CIAM La Fabrique, Université de Toulouse Jean Jaurès

A la manière d’une pratique de divertissement zoologique, ALZ-112 est un environnement pénétrable, composé d’une multitude d’objets, de rebuts humains. Cette installation reprend les codes et les dogmes imposés par l’univers de « l’enrichissement » animalier, dont le vocabulaire formel s’apparente, pour beaucoup, à un mouvement artistique des années 1970, celui du Post-minimalisme. 

Au zoo, l’enrichissement est une pratique bricolée qui sert à pallier l’état dépressif de l’animal en captivité et tente de faire resurgir ses instincts les plus primaires et les plus vitaux. Parfois une forme d’apprentissage est inculquée à l’animal générant chez lui une idée de proto-culture ou de proto-langage. Il ne s’agit pas ici de créer l’illusion d’une nature déjà bien oubliée, mais d’en créer une totalement nouvelle dans une forme de fiction théâtralisée presque cinématographique. Tous les objets et systèmes d’enrichissement deviennent donc palliatifs et transitoires transformant en son cœur la nature-même de l’animal. Le plus frappant, et aussi le plus cynique, est que toute cette pratique zoologique n’est composée que d’éléments délaissés par l’Homme dont la trace écologique n’en est que plus néfaste pour la nature. Il s’agit principalement des mêmes éléments récurrents comme les pneus, les bidons en plastiques, les cordages, les chaines et les tuyaux. Chaque objet est travaillé induisant une utilisation spécifiquement ergonomique. 

Dans ALZ-112, Rémi Groussin tente de rejouer l’enrichissement, en proposant spécialement pour l’exposition Igitur un espace à parcourir, où le spectateur devient l’animal et le White Cube un lieu de capture. Utilisant les mêmes protocoles qu’au zoo, l’installation propose d’imaginer la possible utilisation de chaque élément de ce paysage en suspens. L’idée de sculpture reste dans une certaine forme de tradition où le geste est répétitif, comme dans l’assemblage, la découpe, le tressage, etc… C’est à l’image d’une pratique bien connue des psychologues vétérinaires que le soir du vernissage l’œuvre a été activée par la mise en place de glaçons réalisés par l’artiste et les cuisines de l’université. Il s’agit de gros blocs de glace (normalement offerts aux animaux quand la température devient trop élevée) enfermant des restes de nourriture, qui viennent fondre et révéler les seuls éléments naturels et putrescibles de l’installation, mettant ainsi en exergue la vanité d’une nouvelle Nature Morte scénographiée.

Comme dans le reste de son travail, Rémi Groussin nous invite dans un décor à la limite du studio de cinéma, pour nous laisser reconstruire le scénario probable de cette installation. Le titre de l’œuvre, ALZ-112, directement emprunté au cinéma, fait référence à un rétrovirus injecté sur des singes cobayes pour accroitre leurs facultés cognitives dans le film Rise of the Planet of the Apes. Ce film étant un « reboot » de l’original de 1968, il revient sur les origines de la post-humanisation de ces singes. 

Outre les questions fondamentales sur la domestication animale, le contrôle de l’instinct sauvage et le rapport de l’Homme à la/sa nature, cette œuvre poursuit les questionnements de l’exposition en révélant l’enfermement de l’artiste, de son travail et de l’artiste dans son travail. Quel degré de liberté sauvage réside encore dans notre rapport actuel à l’art ? 

ALZ-112, 2015, installation, objets de récupération, chaînes et cordages, laçons, fruits, légumes et viande

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