Wild Style

2011- en cours

Tirage jet d'encre sur papier baryté 315 g
Dimensions variables

Lors du séminaire Animalité et anthropologie (1), le chercheur Jean-Luc Guichet proposait de répartir les animaux en trois continents s’ignorant mutuellement :

1. L’espace familial : celui de l’affection, l’humanisation, l’individualisation dans lequel l’animal-objet est pris en charge et artificialisé.
2. L’espace industriel : celui de la rationalisation où l’animal est un «matériau » quantifiable, anonyme et dévitalisé dès sa naissance.
3. L’espace sauvage : supposément authentique, mais qui existe surtout, pour la plupart d’entre nous, dans un rapport télévisé, sur un mode fantasmatique. Cet espace constitue une des sources essentielles de l’imaginaire dans nos sociétés. L’animal (qui est géré, ré-introduit, protégé dans des réserves) n’existe ici qu’en groupe.
Ce qui est frappant, c’est que l’animal agit ici comme un miroir des catégories humaines : 1. la famille, 2. le travail (aliénation du salariat dans le capitalisme avancé), 3. les vacances (randonnée, safari etc…).

Dans la lignée de cette réflexion Mazaccio & Drowilal proposent avec Wild Style, un essai photographique qui aborde les thématiques de la représentation de l’animal, de nature artificielle et par extension, du rapport au sauvage dans la société actuelle. Deux séries d’images complémentaires composent ce projet.

Wild Style est une sorte de safari rétinien où la représentation de l’animal est traquée sur des supports variés. Les couleurs flashées sont vives et les cadrages serrés. La figure humaine est souvent hors-champ. Dans ces photographies qui ressemblent à des collages, le spectateur est amené à déconstruire sa manière de regarder et à remettre en question les évidences. Dans son essai Spoiler Alert! (2), Fani Morières analyse ainsi le rapport à l’image des artistes :

Les figures et les objets collectés dans Wild Style évoquent ces imprimés kitsch, mièvres ou flashy des neighties, qu’on retrouve déclinés sur les T-shirts bon marché, les décalcomanies enfantines, les peintures automobiles, les mugs personnalisés et les divers objets ménagers, les décors des rues ou des jardins… (…)

Wild Style apparaît comme un catalogue des formes de réification de la vie animale par l’image, au point que l’écart entre le réel et sa représentation tend à devenir imperceptible. (…).
L’humour de ces images, leur caractère toujours séduisant et souvent ambigu doivent bien faire sentir que la perspective de Mazaccio & Drowilal n’est pas proprement critique : ils établissent plutôt une série de jeux et de connexions autour de ce constat, à l’ère du virtuel, d’une fusion totale […] entre le vivant et le consommable, entre l’étrange et le familier, entre le naturel et l’artificiel, entre la réalité et ses images.

Le deuxième ensemble qui s’intitule Le meilleur Ami du chien agit comme un contrepoint. On y voit des représentants de nos amis canins, de dos, qui semblent perdus dans la contemplation de couchers de soleil romantiques.
Ces photomontages, inspirés d’une photo anonyme trouvée sur internet, et par la peinture romantique allemande du XIXè, assemblent sur le modèle du mème (3), de vrais modèles et des photos de banque d’image puisées dans le fonds photographique du Musée Niépce. Pour parfaire ce collage, chaque image emprunte son titre à une chanson d’amour de pop music.

Comme le suggère le titre, il s’agit à la fois d’un portrait en creux de l’homme et de son rapport à l’animal, mais également d’une réflexion sur construction de la beauté.


J. Woillard


1 - Séminaire Animalité et anthropologie, des Lumières à nos jours, Collège de philosophie, 11 juin 2010 - Avec Florence Burgat, Corine Pelluchon, Ruwen Ogien, Pierre Guenancia et Jean-Luc Guichet
2 - Spoiler Alert! de Fani Morières et Nicolas Heimendinger dans Wild Style, Editions Trocadéro, Paris, 2014
3 - Un mème est un contenu (textuel, photographique, etc.) que les internautes se réapproprient et diffusent en masse sur le web.

Wild Wild West, San Francisco, 2012, 20 x 30 cm

Copycat, Toulouse, 2013, 20 x 30 cm

Exit to Eden, Toulouse, 2015, 60 x 90 cm

Wild Card, Los Angeles, 2015, 60 x 90 cm

Mars Attacks!, San Francisco, 2012, 20 x 30 cm

Double impact, Toulouse, 2013, 27 x 40 cm

Double Dragon, Santa Monica, 2012, 20 x 30 cm

The way you make me feel, 2013, 40 x 50 cm

Cool World, Santa Fe, 2012, 40 x 60 cm

Focus, Geneva, 2019, 27 x 40 cm

Return to the Blue Lagoon, Villefranche de Rouergue, 2013, 20 x 30 cm

Free Willy, Los Angeles, 2012, 20 x 30 cm

Hot pursuit, Wien, 2020, 20 x 30 cm

She’s out of my life, 2013, 40 x 50 cm

Rush Hour, Najac, 2011, 27 x 40 cm

Dances with wolves, 2012, 20 x 30 cm

Bad influence, Manhattan, 2012, 20 x 30 cm

Anesthesia, Ostende, 2014, 20 x 30 cm

Consenting Adults, Malibu, 2012, 40 x 60 cm

Vue de l’exposition Wild Style, Cloître Saint Trophime, 45è Rencontres photographiques d’Arles, 2014

Vue de l’exposition Wild Style, Cloître Saint Trophime, 45è Rencontres photographiques d’Arles, 2014

Vue de l’exposition Laisse à désirer, CACN Centre d’art contemporain de Nîmes, 2022, photo François Deladerrière

Vue de l’exposition Wild Style, Cloître Saint Trophime, 45è Rencontres photographiques d’Arles, 2014

Vue de l’exposition Wild Style, BMW Space Paramount Studios, Paris Photo Los Angeles, 2015

Vue de l’exposition Wild Style, BMW Space Paramount Studios, Paris Photo Los Angeles, 2015